Voilà pourquoi (très entre autre) le Journal de Renaud Camus nous est indispensable [Georges de La Fuly].
« Plieux, dimanche 15 juin 2025, midi moins le quart. Avant-hier on entendait à la radio une émission sur les yachts les plus grands et les plus luxueux, et sur leurs équipages. On y apprenait par exemple que la consommation moyenne en carburant de ces bateaux variait entre six cents et neuf cents litres à l’heure, et que les propriétaires n’étaient pas toujours au-dessus, par économie, d’une bonne vidange sauvage au milieu de la nuit, quelquefois opérée même dans les ports. Pour le reste la très grande fortune paraît bien telle que l’ont toujours imaginée le prolétariat et la petite bourgeoisie, et qu’ils l’ont imaginée pour eux si par miracle ils y accédaient un jour : c’est-à-dire, avant tout, comme autorisant tous les caprices. Par exemple on exige soudain, un dimanche à huit heures du soir, un château cheval blanc 1947 pour accompagner tel plat pour le dîner, et le chef d’équipage est censé le trouver et le trouve en traquant précipitamment, par téléphone, chez eux, ses relations parmi les sommeliers du rivage (à Saint-Tropez ou Monaco, par exemple), et en obtenant d’eux la précieuse bouteille, à n’importe quel prix il va sans dire, fût-il dix fois le prix normal, déjà exorbitant, et le dîner dût-il être retardé d’un quart d’heure. Ou bien une femme de propriétaire, ou de locataire, car ces navires se louent, des centaines de milliers d’euros la semaine, voit à l’escale, dans une galerie, un tableau dont elle s’entiche et qui n’est pas à vendre, car il appartenait au grand-père de la marchande et il est plus ou moins l’emblème de l’établissement : les négociations s’engagent, la marchande refuse de vendre, l’acheteuse potentielle se lasse de l’échange et retourne sur son yacht, avec pour instruction laissée au chef d’équipage qui l’accompagnait que le tableau doit être absolument dans la salle à manger du bateau à l’heure du dîner, qu’il se débrouille — naturellement on se demande ce que peut être un tableau “pas à vendre” mais néanmoins visible dans une galerie habituée à ce genre de clientèle…
« Il est même question de “clients” qui utilisent les serviettes des salles de bain comme papier hygiénique et les laissent sur le sol au soin des domestiques, soit pour les humilier, soit pour se plaindre de leurs services, soit encore par authentique sauvagerie.
« L’impression dominante est celle d’une haute pègre : un monde de voyous, de gens grossiers et brutaux, sans la moindre éducation ni culture, et qui estiment que tout leur est permis parce que leurs moyens sont illimités. Les gens riches et bien élevés, polis, cultivés, amateurs distingués d’archéologie antique, par exemple, ou de sites homériques, mettons, ou de récitals de piano dans les villes du rivage, semblent une espèce qui a complètement disparu. C’est ce que j’ai du mal à expliquer quand je parle d’une part de la dictature de la petite bourgeoisie, celle des masses égalisées, et de l’hyper-classe davocratique d’autre part : l’hyper-classe davocratique appartient à la petite bourgeoisie, elle en est la quintessence dictatoriale, culturellement semblable à elle : même “musique”, même idoles, mêmes manières, différenciées seulement par l’inégalité de moyens, la seule qui demeure (cf. Gómez Dávila, toujours), mais formidable.
« D’ailleurs tout le monde se tutoie, et s’appelle par son prénom : propriétaires et locataires tutoient et appellent par son prénom le personnel, mais c’est vrai aussi, dans une large mesure, en sens inverse, avec sans doute certaines nuances selon qu’il s’agit du chef d’équipage ou des femmes de chambre (c’était surtout un chef d’équipage qui était interrogé, habitué à passer au service de locataires à d’autres pendant la belle saison, et si tutoyeur lui-même que même ses récits étaient à la seconde personne du singulier, en mode Pascal Praud) — et l’idée de devoir passer ne serait-ce qu’une semaine de vacances à bord en pareille compagnie suffirait à vous dégoûter du yachting et des croisières en mer pour le restant de vos jours
« Plieux, dimanche 15 juin 2025, midi moins le quart. Avant-hier on entendait à la radio une émission sur les yachts les plus grands et les plus luxueux, et sur leurs équipages. On y apprenait par exemple que la consommation moyenne en carburant de ces bateaux variait entre six cents et neuf cents litres à l’heure, et que les propriétaires n’étaient pas toujours au-dessus, par économie, d’une bonne vidange sauvage au milieu de la nuit, quelquefois opérée même dans les ports. Pour le reste la très grande fortune paraît bien telle que l’ont toujours imaginée le prolétariat et la petite bourgeoisie, et qu’ils l’ont imaginée pour eux si par miracle ils y accédaient un jour : c’est-à-dire, avant tout, comme autorisant tous les caprices. Par exemple on exige soudain, un dimanche à huit heures du soir, un château cheval blanc 1947 pour accompagner tel plat pour le dîner, et le chef d’équipage est censé le trouver et le trouve en traquant précipitamment, par téléphone, chez eux, ses relations parmi les sommeliers du rivage (à Saint-Tropez ou Monaco, par exemple), et en obtenant d’eux la précieuse bouteille, à n’importe quel prix il va sans dire, fût-il dix fois le prix normal, déjà exorbitant, et le dîner dût-il être retardé d’un quart d’heure. Ou bien une femme de propriétaire, ou de locataire, car ces navires se louent, des centaines de milliers d’euros la semaine, voit à l’escale, dans une galerie, un tableau dont elle s’entiche et qui n’est pas à vendre, car il appartenait au grand-père de la marchande et il est plus ou moins l’emblème de l’établissement : les négociations s’engagent, la marchande refuse de vendre, l’acheteuse potentielle se lasse de l’échange et retourne sur son yacht, avec pour instruction laissée au chef d’équipage qui l’accompagnait que le tableau doit être absolument dans la salle à manger du bateau à l’heure du dîner, qu’il se débrouille — naturellement on se demande ce que peut être un tableau “pas à vendre” mais néanmoins visible dans une galerie habituée à ce genre de clientèle…
« Il est même question de “clients” qui utilisent les serviettes des salles de bain comme papier hygiénique et les laissent sur le sol au soin des domestiques, soit pour les humilier, soit pour se plaindre de leurs services, soit encore par authentique sauvagerie.
« L’impression dominante est celle d’une haute pègre : un monde de voyous, de gens grossiers et brutaux, sans la moindre éducation ni culture, et qui estiment que tout leur est permis parce que leurs moyens sont illimités. Les gens riches et bien élevés, polis, cultivés, amateurs distingués d’archéologie antique, par exemple, ou de sites homériques, mettons, ou de récitals de piano dans les villes du rivage, semblent une espèce qui a complètement disparu. C’est ce que j’ai du mal à expliquer quand je parle d’une part de la dictature de la petite bourgeoisie, celle des masses égalisées, et de l’hyper-classe davocratique d’autre part : l’hyper-classe davocratique appartient à la petite bourgeoisie, elle en est la quintessence dictatoriale, culturellement semblable à elle : même “musique”, même idoles, mêmes manières, différenciées seulement par l’inégalité de moyens, la seule qui demeure (cf. Gómez Dávila, toujours), mais formidable.
« D’ailleurs tout le monde se tutoie, et s’appelle par son prénom : propriétaires et locataires tutoient et appellent par son prénom le personnel, mais c’est vrai aussi, dans une large mesure, en sens inverse, avec sans doute certaines nuances selon qu’il s’agit du chef d’équipage ou des femmes de chambre (c’était surtout un chef d’équipage qui était interrogé, habitué à passer au service de locataires à d’autres pendant la belle saison, et si tutoyeur lui-même que même ses récits étaient à la seconde personne du singulier, en mode Pascal Praud) — et l’idée de devoir passer ne serait-ce qu’une semaine de vacances à bord en pareille compagnie suffirait à vous dégoûter du yachting et des croisières en mer pour le restant de vos jours
(je me suis toujours méfié, n’étant très copain avec personne, de ce type humain qui se vante régulièrement d’être “très copain avec le barman”). »
La musique européenne n’avait eu de cesse qu’elle ne fût séparée de la danse, et la danse européenne qu’elle ne divorçât d’avec la transe. Superficiellement et commercialement américaine, mais profondément africaine, la Pop Music, qui l’a remplacée sans reste, réintroduit la fusion primitive et rétablit le règne proto-archaïque de la transe — plus une manifestation, religieuse, politique ou syndicale, qui n’ait la transe comme expression et comme moyen : il y faut danser, et danser c’est au moins mimer la transe, comme dans les boîtes du samedi soir et les rave parties. Curieusement — et plus curieusement encore le génial Gunther Anders l’avait remarqué il y a trois quarts de siècle —, la transe la plus primitive est en accord parfait avec l’industrialisation et les successives révolutions industrielles. Quant Donald Trump fait son petit pas de danse de triomphe, il mime la transe, mais en même temps il mime la machine, la machine elle-même archaïque des “Temps Modernes”, avec ses roues dentelées et ses engrenages. Mon hypothèse, que paraît confirmer aujourd’hui encore le spectacle des dirigeants sud-africains appelant en dansant, en transe, au massacre des blancs, est que la transe, fusion du corps et de la machine (voir n’importe quel “concert”), machination de l’être, est profondément génocidaire (ou cannibale, si l’on préfère). Il y a plus de résistance au remplacisme global dans un quintette de Brahms que dans un discours de Marine Le Pen.
Le christianisme, seul de toutes les religions, n’avait accepté la musique dans ses offices qu’à la condition qu’elle se séparât d’avec la danse, toujours suspecte de collusion avec la transe. Mais les noirs les ont réintroduites, et, Petit et Grand Remplacement mêlés, la Transe règne au côté du Trans, son époux.
Quelqu’un m’avait demandé une référence dans Günther Anders mais, le temps que je la retrouve, je ne retrouve plus la question…
À une date que les historiens ont encore à préciser, mais postérieure de peu à la Seconde Guerre mondiale, l’éternelle tyrannie fit la découverte qui allait rendre son pouvoir absolu : il ne lui fallait plus s’appuyer sur les riches et sur les puissants, comme elle l’avait fait sottement jusqu’alors bien qu’ils constituassent pour elle autant de potentiels rivaux ; mais sur les plus déshérités, au contraire, en réclamant pour eux l’égalité, conçue non pas comme leur promotion mais comme la suppression des privilèges des héritiers.
Ainsi l’antiracisme obtint-il rapidement la destruction des États européens, de l’Europe et de sa civilisation.
La démocratisation de l’éducation entraîna rapidement la destruction du système scolaire, les élèves, même issus des milieux privilégiés, ne recevant plus que l’éducation dispensée jusqu’alors aux plus défavorisés.
La démocratisation de la culture eut pour conséquence sa disparition, la seule qui restât admise étant celle des milieux qui n’en avaient pas, le reste étant présenté comme un honteux privilège de classe.
Et l’urgence écologique est aujourd’hui étouffée par la même méthode infaillible, toutes les mesures qui pourraient améliorer un peu la situation de la planète étant successivement écartées au prétexte que les plus pauvres ne sauraient les supporter.
Jamais il n’est question d’améliorer le sort de ces plus pauvres ; mais toujours de les utiliser pour empêcher ce qui pourrait nuire aux desseins la tyrannie, c’est-à-dire de la machination industrielle de l’espèce humaine.
Ainsi l’antiracisme obtint-il rapidement la destruction des États européens, de l’Europe et de sa civilisation.
La démocratisation de l’éducation entraîna rapidement la destruction du système scolaire, les élèves, même issus des milieux privilégiés, ne recevant plus que l’éducation dispensée jusqu’alors aux plus défavorisés.
La démocratisation de la culture eut pour conséquence sa disparition, la seule qui restât admise étant celle des milieux qui n’en avaient pas, le reste étant présenté comme un honteux privilège de classe.
Et l’urgence écologique est aujourd’hui étouffée par la même méthode infaillible, toutes les mesures qui pourraient améliorer un peu la situation de la planète étant successivement écartées au prétexte que les plus pauvres ne sauraient les supporter.
Jamais il n’est question d’améliorer le sort de ces plus pauvres ; mais toujours de les utiliser pour empêcher ce qui pourrait nuire aux desseins la tyrannie, c’est-à-dire de la machination industrielle de l’espèce humaine.
Au milieu de la troisième décennie du XXIe siècle, les Français, ont cessé de savoir prononcer le mot “autre”. Ce fut aussi fulgurant et massif que le passage d’“avoir tort” à “avoir tord”. Soudain, et tout à fait en dehors du moindre accent méridional, il n’y eut plus d’autre, seulement de l’otre.
Creusez les inégalités, lisez un livre !
https://www.inegalites.fr/apprentissage-precoce-de-la-lecture-et-inegalites
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Observatoire des inégalités
L’enseignement précoce de la lecture, creuset des inégalités sociales à l’école
Les jeunes Français sont très vite mis en compétition. L’enseignement trop précoce de la lecture, par les parents et à l’école, creuse les inégalités dès le CP. Le point de vue de Louis Maurin, directeur de l’Observatoire des inégalités.
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Le site de Renaud Camus est en panne, nos équipes techniques mettent tout en œuvre, etc. C'est l'occasion de divaguer, en attendant, sur le site Sanctuaire : https://renaudcamus-oeuvres.com